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règles sous pilule

Règles sous pilule, des “fausses règles” ?

Lorsqu’on prend une contraception hormonale, les règles arrivent en général de façon très prévisible, systématiquement le même jour et parfois même à heure fixe. 

La Nature serait-elle si incroyable et millimétrée ?

Pas vraiment non…! 

Car ce qu’on appelle des “règles” sous pilule n’en sont en fait pas du tout, ou en tout cas n’ont rien à voir avec les règles d’un cycle sans hormones de synthèse. Pire, leur unique intérêt serait… de nous rassurer ! On vous explique tout sur ce mal pas si nécessaire que ça.  

fertilite de la femme


C’est quoi, des “vraies” règles ?

Avant d’expliquer en quoi un saignement sous pilule n’a rien à voir avec les menstruations dont nous a affublé Dame Nature, revenons rapidement sur le rôle des règles, à l’origine (pour plus de détails, rendez-vous ici !). 

Ovulation + pas de fécondation = règles

Chaque cycle peut être divisé en 4 phases : 

  • Les règles, qui ouvrent un nouveau cycle lorsqu’il n’y a pas eu de fécondation lors du cycle précédent
  • La phase pré-ovulatoire, au cours de laquelle le corps, sous l’effet des oestrogènes, prépare à la fois un ovule et épaissit la paroi de notre utérus (appelée l’endomètre) en la vascularisant pour qu’elle puisse, le cas échéant, accueillir un embryon (on dit qu’il construit un “nid”)
  • L’ovulation, lors de laquelle l’ovule est libéré
  • La phase post-ovulatoire, qui se traduit par une hausse de la progestérone qui vient maintenir le nid et qui, au bout de 14 jours, ouvre deux options :
    • Soit il y a eu fécondation, la progestérone et les oestrogènes restent élevés pour que l’embryon puisse aller s’implanter dans le nid
    • Soit il  n’y a pas eu fécondation, la progestérone chute alors, ce qui entraîne l’évacuation du nid qui n’a plus d’utilité : ce sont les règles

Autrement dit, les règles interviennent de façon cyclique en réponse à l’ovulation : elles sont le signe qu’un ovocyte a bien été libéré, que votre utérus a bien préparé un nid pour l’accueillir s’il devait rencontrer un spermatozoïde, mais que faute de fécondation, l’endomètre-nid est évacué. 

phases du cycle féminin

En revanche, s’il y a fécondation, on n’a pas de règles tout simplement car le nid reste en place pour que le bébé puisse s’y développer. Il n’y a plus d’ovulation pendant les 9 prochains mois, pour éviter qu’un deuxième bébé viennent s’ajouter au premier !


Un état de grossesse simulé

C’est en se calquant sur cet état de grossesse qu’a été créée la pilule : en faisant croire au corps, grâce à des hormones de synthèse qui simulent les taux élevés de progestérone et d’oestrogènes, qu’une grossesse est en cours, il bloque toute nouvelle ovulation et toute construction d’un nouveau nid. Le cycle est mis en sommeil, en pseudo grossesse prolongée (sauf que pendant la grossesse, ce sont des hormones naturellement produites par notre corps, avec tous les bienfaits qui les accompagnent).

L’endomètre reste fin et non vascularisé, il ne se détache pas en fin de cycle et ne provoque donc pas de saignement. C’est simple, pas d’ovulation = pas de règles (cela vaut aussi bien pendant la grossesse qu’avant la puberté, après la ménopause ou avec un contraceptif hormonal).  

Oui mais alors, d’où vient-elle, cette perte de sang sous pilule ?


Règles sous pilule : en quoi sont-elles des fausses règles ?

S’il n’y a ni ovulation ni croissance de l’endomètre, l’utérus a-t’il besoin d’éliminer une quelconque couche ? 

Absolument pas !

Il n’y a aucune raison médicale ou scientifique à ces saignements, leur seul intérêt est de donner à la femme l’assurance de ne pas être enceinte (or, l’arrivée de ces fausses règles n’est pas un signe à 100% d’absence de grossesse, comme c’est le cas sans contraception), et l’impression d’être toujours une femme pouvant, de façon réversible, redevenir fertile (c’est vrai, mais pas besoin de règles artificielles pour cela). 

Leur nom officiel dans le jargon médical est “hémorragie de privation”.

gouttes de sang

Concrètement en effet, les règles sous pilule correspondent à un saignement dit “de privation”, le principe de la pilule étant d’apporter des hormone de synthèse les ¾ du mois, puis de les faire chuter brutalement le dernier ¼, pour provoquer un saignement. Elle crée un faux cycle de 28 jours, avec 21 jours de comprimés dosés et 7 jours de placebo (ou d’arrêt, selon les méthodes). 

C’est pendant la semaine de privation hormonale que l’utérus réagit : du fait de cette baisse soudaine, une hémorragie est provoquée car la muqueuse a été ramollie par les hormones. 

Evidemment, cette perte de sang est moins abondante et moins longue que des règles naturelles, puisqu’il n’y a pas de “couches” à éliminer. 

Pour plus d’info sur les modes d’action des différents contraceptifs hormonaux (combiné ou progestatif), et les différents cycles artificiels (21+7, 24+4, 28 en continu), rendez-vous ici

Mais il faut savoir que ce principe de semaine de privation n’existait pas à l’origine : les premières pilules fonctionnaient en continu et, en conséquence, ne provoquaient aucun saignement.

Autrement dit, les femmes ne devraient plus avoir de règles sous pilule. Mais alors, pourquoi avoir créé une telle contrainte de façon factice ?


Pourquoi avoir créé de telles règles artificielles ?

Pour comprendre la raison de ces “fausses règles”, il faut remonter aux années 50, lorsque la pilule a été lancée. Ses créateurs, Gregory Pincus et John Rock, ont préféré (on cite) “mimer le cycle menstruel pour optimiser l’acceptabilité des femmes” et “paraître plus naturel”, mais aussi pour “ne pas se mettre à dos l’Eglise” (on a d’ailleurs pu parler de “règle du Pape” !). 

Autrement dit, la seule raison d’être de ces pseudo règles était de favoriser l’acceptation d’une telle contraception alors révolutionnaire, les règles étant symboliquement associées à la féminité et à la fertilité (breaking news : c’est vrai !!). 

Ils ont alors été décidé de rythmer artificiellement le cycle, en créant des fausses règles imitant les vraies (avec les mêmes désagréments, hélas).

pilule plaquette

Les règles sous pilule jouent-elles quand même un rôle pour nettoyer notre corps ?

C’est un croyance très répandue, chez au moins 40% des femmes : les règles permettraient de nous purifier.

C’est d’ailleurs cette certitude qui freine beaucoup de femmes à prendre leur pilule en continu et les conduit réserver ce “détournement” à des occasions spéciales, persuadées qu’elles doivent laisser leur corps se laver régulièrement en éliminant du sang. 

Or même au naturel, les règles n’ont aucun rôle purificateur, elles ne sont que la conséquence de l’absence de fécondation 14 jours plus tôt.

C’est tout, rien n’est sale, rien n’est impur, rien n’a besoin d’être nettoyé ! Pas plus avec que sans pilule. 

Les règles sous pilule n’ont aucune utilité, à part nous rassurer….


Du coup, on pourrait se passer des règles avec la pilule ?

Cela nous est arrivé à toutes ou presque : lorsqu’on part en vacances ou qu’on a un “date” très important, on enchaîne deux plaquettes de pilule en continu pour ne pas avoir nos règles pendant un cycle. 

Les médecins utilisent aussi cette technique dite de l’aménorrhée thérapeutique pour soulager des femmes ayant des règles particulièrement douloureuses.

Mais ce n’est pas qu’un “bidouillage”. Il existe désormais des contraceptifs en continu (pilule micro progestative, pilule combinée en continu, implant ou certains stérilets au levonorgestrel) avec lesquels les règles sont totalement supprimées.

Pas de semaine de privation, donc pas de saignement de privation (il peut en revanche y avoir quelques « spottings » de temps en temps, en réaction aux hormones).

D’ailleurs, cela a été officiellement rappelé par le Collège royal des obstétriciens et gynécologues anglais (le FSRH) qui, dans ses lignes directrices pour 2019, a rappelé avec insistance que sauter la semaine de placebo d’une pilule contraceptive ne comporte aucun risque médical, que les saignements sous pilule ne sont pas des menstruations physiologiques et qu’ils n’ont aucun avantage pour la santé

En revanche, il rappelle que ces règles de privation présentent des inconvénients, notamment des saignements douloureux ou abondants, des maux de tête ou des changements d’humeur, mais aussi un risque accru de grossesse non désirée du fait du risque d’oubli. 

En gros, que des galères et aucun bénéfice (contrairement aux règles d’un cycle au naturel qui, lui, a de réels effets positifs sur notre santé.

fertilité féminine


Le mot de la fin : soyons libre de vivre nos règles comme on le souhaite !

Vous l’avez compris, l’idée dans cet article n’est absolument pas de dire qu’il ne faut pas prendre la pilule ou qu’elle est néfaste. Juste d’expliquer exactement comment elle fonctionne (blocage du cycle naturel grâce à des hormones de synthèse), et en quoi les saignements qu’elle provoque ne doivent absolument pas être confondus avec des règles.

Une femme sous contraceptif hormonal n’a plus de cycle au sens naturel du terme, puisqu’elle n’ovule plus et qu’elle n’a plus de règles. Son cycle est en sommeil. 

Vous pensiez qu’avoir vos règles sous pilule étaient un mal nécessaire ? Et bien non seulement elles sont complètement simulées, mais en plus, elles n’ont aucune utilité et pourraient même être supprimées en prenant sa pilule en continu.

Le fin mot de l’histoire : chaque femme est LIBRE ! Libre d’avoir des règles artificielles, libre de ne plus avoir de règles du tout, mai aussi libre d’avoir de vraies règles, en adoptant une approche naturelle de son cycle et en étant à l’écoute de dans sa féminité et sa santé. 

Vous connaissiez ces subtilités autour des règles ? Ou au contraire vous les avez découvertes dans cet article ? Venez nous partager vos impressions en commentaire !

19 réflexions au sujet de “Règles sous pilule”

  1. Bonjour,

    Un immense merci pour ce travail d’information que vous faites à destination des femmes. Je suis heureuse qu’à l’heure actuelle, les femmes aient de plus en plus accès à la connaissance de leur corps mais je me sens terriblement frustrée d’apprendre le fonctionnement de nos cycles, de la contraception et des effets qu’elle peut avoir sur nos corps seulement après 15 ans d’utilisation. Reprenons le pouvoir de notre corps par la connaissance!

    Répondre
  2. Bonjour, merci milles fois pour toutes ces précieuses informations qui ne sont malheureusement pas assez connues aux yeux de tous !!

    Répondre
  3. Article intéressant !
    J’ai juste une petite question, est ce qu’on pourrait penser que les règles de privations ont (aussi) été conservé pour garder le marché des serviettes hygiéniques etc… ?
    Réel question pas de théorie du complo ni rien juste un réflexion. Merci de votre avis !
    Bonne journée à vous
    Une personne intriguée…

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  4. Merci infiniment pour ces informations, J’ai beaucoup aimé la phrase il n’y a rien à purifier. Merci beaucoup d’informer les femmes et de leur permettre de comprendre leur corps et leur cycle. Je suis touchee et très reconnaissante

    Répondre
  5. Bonjour,
    j’ai 65 ans, et je viens de découvrir que les règles sous pilule étaient artificielles , merci à ma fille de m’avoir transmis cet article intéressant ! J’ai un doctorat en physiologie, et jamais au cours de mes études je n’avais entendu parler de cela , c’est incroyable toutes les vérités que l’on peut nous faire ignorer !
    Par contre, je pense que le fait de transformer son cycle de façon continue et pendant une longue période doit forcément avoir des conséquences à long terme sur son corps, malgré l’avis des médecins qui disent le contraire…
    Merci à vous pour les informations.
    Marie

    Répondre
    • Bonjour Marie, merci pour cet adorable message !
      Je suis assez d’accord avec vous, d’autant que si ces hormones sont produites naturellement par notre corps, ce n’est pas pour rien. Au delà de leur rôle dans la reproduction, on en a besoin pour la santé de nos os, notre système cardio vasculaire, le bon fonctionnement de notre cerveau, etc.
      Chaque ovulation est une pièce dans la machine de notre santé et de notre longévité ! Il est donc dommage de l’éteindre, je vous rejoins à 1000% !

      Répondre
  6. Mille mercis pour cet article, c’est ce que je recherchais ! Je me suis toujours questionnée sur l’importance de ces saignements sous pilule, et cet article est une mine de renseignements pour moi. Merci !

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  7. bonjour et merci pour ce super article qui nous apprend beaucoup à toute, cependant il y a une question à laquelle je n’arrive pas à répondre : pourquoi sur certaines femmes la prise de pilule en continue (alors même que la pilule est faite pour être prise de la sorte) provoque tout de même d’importants saignements plusieurs semaines avant la prise des placebo alors qu’en principe la quantité d’hormones n’a pas diminué dans le corps ? certaines femmes sont elle plus sensible ?

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    • Bonjour Anna,
      Tu parles de saignements comme des règles artificielles ou des saignements qui interviennent à n’importe quel moment du cycle ? Car un pilule non adaptée peut provoquer des saignements, dans ce cas il faut en changer !
      A bientôt !

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  8. Merci beaucoup, enfin un article qui explique clairement la constitution de ce sang hors menstruations, je n’arrivais pas à trouver d’informations à ce sujet. Merci encore ! 🙏

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  9. Article vraiment intéressant pour comprendre comment fonctionnelle la pilule et quels effets elle a sur le corps. Plus de personnes devraient le lire pour être au courant. Je trouve ça vraiment important.

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    • Merci beaucoup pour ce message et je suis d’accord, ce sujet devrait être beaucoup plus partagé !!
      A bientôt ; )

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Auteur/autrice de l’image

Émancipés redonne aux femmes le contrôle sur leur cycle menstruel.

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